Vous avez sans doute un jour entendu parler de photos en 8 bits, 16 bits… Qu’est ce que ça veut dire ? A quoi ça sert ? Et bien c’est ce que je vous propose de découvrir aujourd’hui…

Le codage de la couleur

Une image numérique est un assemblage de pixels. La couleurs de ces pixels est déterminée par le mélange de 3 couleurs dîtes primaires : le rouge, le vert et le bleu. Ça correspond à la fameuse synthèse additive RVB dont vous avez déjà peut-être entendu parler. Dans le cas contraire, il ne vous reste plus qu’à lire l’article qui traite de ce sujet.

Revenons à ces trois fameuses couleurs primaires. Si je les prends et que je les mélange telles quelles, je peux obtenir en tout et pour tout, 8 couleurs différentes :

  • du noir si aucune couleur n’est présente,
  • du rouge si seulement le rouge est présent,
  • du vert si seulement le vert est présent,
  • du bleu si seulement le bleu est présent,
  • du jaune si on additionne le rouge et le vert,
  • du cyan si on additionne du bleu et du vert,
  • du magenta si on additionne du rouge et du bleu,
  • du blanc si on additionne du rouge, du vert et du bleu.

Ces 8 couleurs possibles viennent du fait que les valeurs de rouge, de vert et de bleu sont codées sur 1 bit. Cela signifie que chaque couleur primaire est codée avec un seul chiffre :

  • valeur 0 : la couleur n’est pas présente
  • valeur 1 : la couleur est présente
2 nuances de couleurs possibles en 1 bit

2 nuances de couleurs possibles en 1 bit

Si je reprends les 8 couleurs précédentes, j’obtiens donc les valeurs RVB suivantes avec un codage sur 1 bit/couleur :

  • R = 0 ; V = 0 ; B = 0 (noir)
  • R = 1 ; V = 0 ; B = 0 (rouge)
  • R = 0 ; V = 1 ; B = 0 (vert)
  • R = 0 ; V = 0 ; B = 1 (bleu)
  • R = 1 ; V = 1 ; B = 0 (jaune)
  • R = 0 ; V = 1 ; B = 1 (cyan)
  • R = 1 ; V = 0 ; B = 1 (magenta)
  • R = 1 ; V = 1 ; B = 1 (blanc)

Voilà ce que ça donne si je décide d’afficher une image en 1 bit. Avouez que la gamme de couleurs est un peu juste pour aboutir à une belle image. Pour reproduire cet effet dans Photoshop, allez dans Calque > Nouveau calque de réglage > Isohélie…

1 bit/couche de couleur

1 bit/couche de couleur

Pour que les 3 couleurs primaires à la base de la synthèse additive RVB puissent reproduire d’avantage de couleurs, il faut donc jouer sur l’intensité de l’éclairage de ces 3 couleurs.

Si je passe en 2 bits par couleurs, il faut à présent 2 chiffres pour coder la couleur. Le nombre de couleurs possibles est multiplié par 2. J’obtiens donc 4 valeurs numériques pour qualifier l’intensité de chaque couleur.

Si je prend l’exemple du rouge, j’obtiens les 4 valeurs suivantes :

  • R = 00 (noir donc pas de rouge)
  • R = 01 (rouge gris foncé)
  • R = 10 (rouge gris clair)
  • R = 11 (Rouge intense)

Avec 2 bits par couleur on arrive donc à un total de 4 nuances de rouge X 4 nuances de vert X 4 nuances de bleu soit 64 couleurs possibles.

4 nuances de couleurs possibles en 2 bits

4 nuances de couleurs possibles en 2 bits

Si je reprends la photo de tout à l’heure, voilà ce que j’obtiens. C’est mieux mais c’est encore loin d’être suffisant.

2 bits/couche de couleur

2 bits/couche de couleur

A 3 bits par couleurs, je vous le donne Emile, il faut 3 chiffres pour coder la couleur. On arrive donc à 8 nuances par couleur (le nombre de nuances est multiplié par 2 à chaque fois que la profondeur de couleur augmente d’un bit).

Si je reste avec l’exemple du rouge, voilà ce que ça donne :

  • R = 000
  • R = 001
  • R = 011
  • R = 100
  • R = 110
  • R = 010
  • R = 101
  • R = 000
8 nuances de couleurs possibles en 3 bits

8 nuances de couleurs possibles en 3 bits

Au total, on obtient donc 8 x 8 x 8 soit 512 couleurs possibles

3 bits/couche de couleur

3 bits/couche de couleur

à 4 bit par couleur on obtient 16 x 16 x 16 soit 4 096 couleurs possibles

16 nuances de couleurs possibles en 4 bits

16 nuances de couleurs possibles en 4 bits

4 bits/couche de couleur

4 bits/couche de couleur

à 5 bit par couleur on obtient 32 x 32 x 32 soit 32 768 couleurs possibles

32 nuances de couleurs possibles en 5 bits

32 nuances de couleurs possibles en 5 bits

5 bits/couche de couleur

5 bits/couche de couleur

à 6 bit par couleur on obtient 64 x 64 x 64 soit 262 144 couleurs possibles

64 nuances de couleurs possibles en 6 bits

64 nuances de couleurs possibles en 6 bits

6 bits/couche de couleur

6 bits/couche de couleur

à 7 bit par couleur on obtient 128 x 128 x 128 soit 2 097 152 couleurs possibles

128 nuances de couleurs possibles en 7 bits

128 nuances de couleurs possibles en 7 bits

7 bits/couche de couleur

7 bits/couche de couleur

à 8 bit par couleur on obtient 256 x 256 x 256 soit 16 777 216 couleurs possibles

256 nuances de couleurs possibles en 8 bits

256 nuances de couleurs possibles en 8 bits

8 bits/couche de couleur

8 bits/couche de couleur

Voilà comment à partir de 3 petites couleurs de base, un appareil électronique est capable d’afficher autant de couleurs. Simplement en jouant sur l’intensité des couleurs rouges, vertes et bleues.

Le codage sur 8 bits

Avec 16 millions de couleurs, il y a suffisamment de nuances pour reproduire ce que l’oeil humain est capable de percevoir. Voilà pourquoi, il a été décidé de coder la profondeur de couleur sur 8 bits. Ça correspond donc au standard d’aujourd’hui.

Le fameux format JPEG, que tout le monde connait, affiche les couleurs sur 8 bits. Pour vous en convaincre, ouvrez une image au format JPEG et regardez attentivement la barre de titre de cette image. A droite du nom du fichier, vous verrez un chiffre 8 qui correspond bien entendu à la profondeur de couleur.

Sachez enfin qu’il est facile de calculer le poids d’une image à partir de sa définition. Le codage de la couleur sur 8 bits « pèse » 1 octet. Vu qu’il y a 3 couleurs, il faut donc 3 octets pour coder la couleur d’un pixel. Une image de 20 millions de pixels pèse donc 60 millions d’octets c’est-à-dire 60 mégas octets. Bien entendu, si vous travaillez en JPEG, le poids de vos images est inférieur à cette valeur vu que c’est un format de fichier compressé (attention d’ailleurs à ne pas trop compresser vos images…).

Le codage sur 16 bits

Si vous regardez la fiche technique des APN actuels, vous constaterez que les capteurs qui les équipent sont capables de capter les couleurs au delà des 8 bits/couche proposés par le format JPEG. Pour permettre à votre appareil d’enregistrer plus de nuances de couleurs, il faut bien entendu opter pour le format Raw à la prise de vue (ou DNG pour les boitiers qui gèrent ce type de fichier). En ce qui concerne les scanners, il faut opter pour le format TIFF.

Le passage de 8 à 16 bits offre donc un nombre de couleurs gigantesque puisque chaque couche (rouge, verte et bleue) est capable de coder 2 16 soit 65 536 nuances différentes. Le nombre de couleurs possible passe donc à 65 536 x 65 536 x 65 536 soit plus de 281 mille milliards (de mille sabord 🙂 ) de nuances.

Si vous avez choisi le format Raw à la prise de vue, vous post-traitez par défaut vos images en mode 16 bits. Le format Raw permet donc de travailler dans un flux à grande profondeur de couleur. C’est l’un de ses nombreux avantages…

Le problème que l’on peut rencontrer, lorsque l’on traite ses fichiers Raw, c’est que les fonctions proposées par ces logiciels ne sont pas toujours suffisantes pour aller au bout du travail de retouche. Dans ce cas là, pas le choix, il faut exporter l’image avec les corrections déjà apportées et terminer la retouche dans un logiciel de gestion des calques comme Photoshop, Affinity Photo etc…

Se pose donc alors la question de savoir dans quelle profondeur de couleur continuer le traitement de ses images (8 ou 16 ?)

Choix de la profondeur de couleur à l'exportation (Lightroom)

Choix de la profondeur de couleur à l’exportation (Lightroom)

Inconvénients du 16 bits

Travailler en 16 bits, c’est bien, c’est mieux. Ça va dans le sens de la qualité. Mais, comme toute chose, ça a aussi son lot d’inconvénients…

  • les couleurs étant codées sur 16 valeurs au lieu de 8, le poids des fichiers est donc deux fois plus lourd. Par exemple, une image d’une définition de 24 millions de pixels pèsera donc 24 x 6 octets soit 144 Mo. Si l’on ajoute le poids des calques qui vont immanquablement s’ajouter à votre composition, vous obtiendrez couramment des images de 200 à 300 Mo, voir bien plus… Il va de soit que travailler ce type d’image nécessite un ordinateur costaud et un espace de stockage conséquent.
  • seulement quelques extensions de fichiers image supportent le 16 bits. Utiliser une profondeur de couleur supérieure au JPEG ne peut se faire que dans des formats comme TIFF, PSD ou quelques formats propriétaires.
  • très peu de logiciels gèrent le 16 bits. Les retouches d’images à grande profondeur de couleur étant réservées aux amateurs avertis et aux professionnels, il faut donc obligatoirement utiliser un logiciel photo professionnel (Photoshop ou Affinity Photo par ex…).

Dans quel cas utiliser le codage de la couleur sur 16 bits ?

Si on a besoin de faire des corrections importantes, les 8 bits/couche peuvent ne pas être suffisants.

J’ai repris l’image d’illustration ci-dessus qui, à la base, est sous exposée. Je lui ai ajouté un calque de réglage Niveaux pour rééquilibrer sa tonalité et un calque de réglage Courbe pour lui donner un peu plus de contraste. J’ai ensuite copié/collé ces calques sur la même image en 16 bits.

 

Comme vous pouvez le constater, l’image en 8 bits a un histogramme en forme de peigne. Concrètement, cela signifie que des nuances de couleur on été perdues. Ce déficit de nuances de couleur peut être visible dans le cas des dégradés de ciels avec l’apparition d’un effet d’escalier.

Avec l’image en 16 bits, l’histogramme est bien lisse, toutes les nuances sont conservées et je peux continuer le travail de retouche sans aucun soucis…

Passer en 16 bits est donc avant tout une assurance qui permet d’éviter l’apparition d’artefacts en cas de forte retouche.

Alors, faut-il passer au 16 bits ? Cette question n’a réellement de sens que si vous êtes un retoucheur de photo confirmé.

L’idéal c’est sans doute de travailler en 16 b seulement lorsque cela est nécessaire :

  • Si, par exemple, vous retouchez fortement des photos de paysage, il est préférable de travailler en 16 bits. Vous aurez ainsi l’assurance de ne pas avoir de cassures de teintes dans vos ciels.
  • Passer en 16 bit pour des photos en noir et blanc peut également être intéressant. Passer de 256 nuances de gris à 65 536 vous mettra définitivement à l’abri de l’apparition de ces fameux artefacts.
  • Si, au contraire, vous faîtes des photos ou il y a peu d’aplat de couleurs comme le sport, les animaux, ce n’est pas forcément nécessaire.

Conclusion

En ce qui me concerne, j’optimise au maximum mes images prises au format Raw avec Lightroom. Vu que je me contente d’embellir mes photos, j’ai rarement besoin de poursuivre le travail de retouche dans un autre logiciel. Mais, quand c’est nécessaire, j’exporte tout de même en TIFF 16 bits (je suis un adepte du « qui peut le plus, peut le moins »).

Par contre, en ce qui concerne la restauration des photos de mes clients, je numérise systématiquement les images en TIFF 16b. Il s’agit presque toujours de photos décolorées, passées, sur lesquelles le travail de récupération des nuances de teintes ou de couleurs peut être important.

Sachez enfin que l’on peut même aller au delà du 16 bits et passer en 32 bits. C’est ce que l’on appelle le HDR.

Et vous, utilisez-vous une profondeur de couleur de 16b pour retoucher vos photos ?

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