Savez-vous que le développement d’un fichier Raw peut changer du tout au tout selon le logiciel utilisé et les paramètres de développement choisis ? Cet article fait le point sur ce sujet à travers un exemple concret…
Article mis à jour le 21/03/2017
Quand je ne retouche pas les photos de mes clients, j’utilise beaucoup Lightroom. C’est la solution logicielle que j’ai choisi pour classer, organiser et optimiser mes images. Je photographie exclusivement en Raw et c’est en retouchant cette photo prise de nuit que m’est venu cette idée d’article…
Le développement Raw par défaut
Comme vous pouvez le constater, un aplat bleu du plus mauvais effet est présent à plusieurs endroits sur l’image (notamment sur la bache du chapiteau). Honnêtement, c’est la première fois que je vois un tel phénomène sur une photo.
Etant donné que j’avais pris plusieurs images de la même scène en changeant les paramètres d’exposition (je fais toujours cela pour les photos de nuit de manière à être sur d’avoir une image exploitable dans le lot), je me suis empressé de regarder les autres photos de la série : même résultat.
Vu que je n’avais pas encore effacé ou formaté les images présentes sur la carte de mon APN, j’ai également jeté un coup d’oeil à l’arrière de mon boitier pour voir comment elles s’affichent sur celui-ci (c’est un détail qui m’avait échappé lors de la prise de vue). Résultat : c’est mieux mais ce n’est pas encore ça…
De deux choses l’une : soit c’est mon boitier qui est incapable de rendre les nuances de couleur présentes sur le chapiteau réfléchissant la lumière bleutée (et là, c’est la cata), soit c’est le traitement du Raw par mon logiciel qui n’est pas correct.
Je retourne donc dans Lightroom, module Développement/Etalonnage de l’appareil photo. C’est bien le processus 2012 qui est sélectionné. Je suis donc sur le processus de développement le plus récent proposé par Adobe à ce jour. Jusqu’ici, tout est OK…
En dessous, l’option Profil est réglée sur Adobe Standard. Je la passe sur Camera Neutral… et MIRACLE !, la restitution du chapiteau est OK.
Conclusion : c’est le réglage par défaut de Lr qui est défaillant (Adobe Standard).
Bien sur, le rendu Camera Neutral est plus terne mais il offre l’avantage de récupérer toutes les nuances de teintes.
Avec cet exemple, on voit parfaitement que les optimisations apportées par défaut par Lightroom sur les fichiers Raw sont loin d’être anodines.
Du coup, j’ai eu envie de développer cette même image avec les autres logiciels de traitement Raw que j’ai en ma possession, histoire de faire un petit comparatif sur le résultat obtenu par les autres logiciels.
Comme vous pouvez le constater sur les photos ci dessous, on a de tout…
Les algorithmes de traitement Raw
La question que l’on peut donc légitimement se poser après avoir visualisé tous ces rendus est : pourquoi tant de différences sur une seule et même image ?
Pour bien comprendre le pourquoi du comment, il faut savoir ce qu’est un fichier Raw. C’est un format de fichier propriétaire qui contient entre autre, l’ensemble des données numériques transmises par le capteur. Et ces données, elles ne sont pas lues, interprétées de la même façon par votre appareil photo et les différents logiciels de retouche photo présents sur le marché. Pourquoi ? Tout simplement parce que les algorithmes de traitement sont à chaque fois différents. Il existe donc une infinité de manières d’interpréter ces données brutes de capteur et c’est bien pour cela que l’on a choisi le terme Raw pour qualifier ce type de fichier (ça signifie brut en Anglais). On appelle cette opération le dématriçage.
C’est ça la différence essentielle qu’il y a entre les fichiers Raw et JPEG. Le fichier Raw n’est pas figé, il peut donc bénéficier intégralement des nouveaux algorithmes, des dernières avancées proposées par les éditeurs de logiciels (on en est à la troisième version du processus de développement proposé par Adobe, DXO propose à chaque nouvelle version de nouvelles améliorations comme le débruitage des images, etc…). Résultat : la qualité des images délivrées par les logiciels de traitement Raw s’améliore sans cesse. Il est donc possible de reprendre une ancienne image et de lui appliquer les dernières améliorations pour obtenir au final une meilleure photo.
A l’inverse, le JPEG est un fichier Raw développé (le Raw ayant servi à le générer est tout simplement supprimé par l’APN dès que le JPEG a été créé). C’est une lecture, une interprétation d’un fichier Raw. Il ne peut donc plus être modifié à postériori.
Revenons à ma photo… Dans le cas présent, aucun des algorithmes de traitement par défaut n’a été capable de restituer les nuances de couleurs présentes sur la bâche. Si j’avais choisi le format JPEG à la prise de vue, je n’aurai jamais réussi à me débarrasser de cet aplat bleu. En effet les profil proposés par Lightroom (Adobe Standard, Camera Neutral…) ne sont opérationnels que pour les fichiers Raw (vous savez pourquoi maintenant). Cet exemple est bien sur aussi l’occasion de mettre en évidence le fait que, même avec le choix du Raw à la prise de vue, il ne faut pas forcément se fier aux réglages par défaut proposés par votre logiciel.
Conclusion
C’est pour éviter ce genre de désagrément que j’ai choisi le rendu neutre de Lightroom. J’évite ainsi à ce logiciel de me fournir des fichiers qui pourraient être mal interprétés. De plus, si j’ai choisi la solution de la retouche non destructive, c’est pour avoir une maîtrise totale du processus de développement que je préfère gérer de A à Z. J’ai donc créé mon petit paramètre prédéfini qui applique automatiquement le rendu Camera Neutral à mes images dès l’importation dans la bibliothèque (nous verrons comment faire cela dans un prochain article).
Et vous ? faîtes-vous confiance aux paramètres de développement par défaut de votre logiciel ?
Je capture toujours en Raw + Jpeg et je dois reconnaître que le Jpeg du boîtier est souvent meilleur que mon traitement du Raw (j’utilise Darktable) en particulier au niveau du bruit en sous exposition. Je persévère mais finalement j’utilise plus le post-traitement Raw pour « personnaliser » ma photo que pour délivrer une photo « standard / équilibrée » pour laquelle l’algorithme du boîtier est encore pour le moment meilleur que mes réglages.
Comme je le disais, j’ai le même problème avec DxO OpticsPro qui cherche toujours à donner un rendu moyen et donc à éclaircir les parties sombres, quitte à faire ressortir le bruit.
J’aimerais qu’il doit plus intelligent encore et qu’il prenne en compte le fait qu’une photo a été prise dans une faible lumière, surtout si la correction d’exposition est -1 ou moins. Ça devrait lui mettre la puce à l’oreille que la photo ne doit pas être traitée comme si elle avait été prise en plein jour. Je m’en sors en annulant son réglage par défaut et bidouillant moi-même les curseurs d’exposition (il y en a quatre).
Quel boitier vous utilisez ?
Le JPEG étant un fichier dérawtisé et créé par votre APN, ce n’est pas surprenant qu’il soit plus « joli » que le Raw. J’utilise occasionnellement Dartable (sur mon notebook qui tourne sous Linux et que j’utilise quand je suis en voyage) mais je n’ai jamais étudié de près ses algorithmes de traitement.
C’est ça la qualité première de ce type de logiciel : qu’il soit capable de développer de la meilleure manière possible les fichiers Raw. Ca vaudrait peut-être le coup pour vous d’essayer un logiciel concurrent pour vous permettre de voir le rendu que vous pouvez tirer de vos images.
Le fait de capturer en Raw + JPEG est une bonne option. Lorsque vous serez « au point » vous pourrez passer intégralement au Raw … ou pas… 🙂
Bonjour, je dispose aussi de photoshop elements 12 et parfois je ne peux ouvrir mes images CR2 en mode raw, cela ne s’affiche pas. Pourquoi, je dispose de la version camera raw8
Bonjour,
ça c’est bizarre… Y a t-il un message d’erreur qui s’affiche ? Avez-vous la dernière version à jour de Camera Raw pour Photoshop Elements ?
J’en profite pour vous informer que mon prochain article traitera de Camera Raw…
Merci pour cet article très instructif.
J’ai très récemment perdu patience face à un problème similaire (avec un pull rouge…) et n’avais pas réussi à comprendre le pourquoi du problème, ni donc à le solutionner…
Me voici un peu moins ignorant ; merci !
Est-que tous les essais on été faits avec le profil neutre, dans Rawtherapee il y a un profil neutre (conseillé dans le manuel et dans l’article de compétence photo), mais il n’est pas activé par défaut à l’installation du logiciel.
Bonjour Daniel,
Non, pour rester dans le thème de mon article, j’ai seulement utilisé le rendu par défaut. Il n’y a qu’avec Lr que j’ai testé plusieurs profils de développement.
Bonjour
Intéressant petit test. À mon sens les deux meilleurs sont DxO et DPP et les deux pires sont Affinity et RawTherapee. Le rendu par défaut de LR vous pète à la figure ! Le rendu neutre est tout à fait correct.
Nicolas Daum
Bonjour Nicolas,
Je suis d’accord. Bon, d’un coté, l’exemple est une photo de nuit. Les écarts sont forcément plus importants…
C’est justement ce qui est intéressant. Quand la photo est « facile », avec un sujet sous un bon éclairage, assez homogène, sans contraste trop fort, tous les softs s’en sortent bien. C’est dans les cas difficiles qu’on voit la différence.
J’utilise DxO : avec les photos en basses lumières il fait à mon sens du zèle et les parties sombres deviennent un peu de la bouillie. Si c’était noir je veux que ça reste noir. Je mets à zéro le curseur du Smart Lighting pour qu’il ne fasse aucune correction par défaut et je joue sur les curseurs de luminosité.
Sinon il fait du bon travail, on le voit dans votre exemple.
ND