Derrière ce titre un peu provocateur, c’est une révolution technologique qui s’opère actuellement dans le monde de la photographie. En effet, si vous vous intéressez quelque peu à l’actualité photographique, cette fin d’année 2018 marque un tournant dans l’histoire de la photo : le début de la fin des appareils de type réflex et la montée en puissance des hybrides. Pourquoi ce changement ? C’est ce que nous allons voir dans cet article…

Reflex-Hybride

Mélange Réflex – Hybride

Mais avant cela, faisons un petit tour en arrière de quelques semaines (fin août)… ou moment ou Nikon a ouvert le bal avec l’annonce de deux nouveaux hybrides plein format, les Nikon Z6 et Z7. Son rival de toujours, Canon a réagi deux semaines plus tard en présentant l’EOS R. Et, fin septembre, c’est Lumix qui annonce que lui aussi se lance dans le plein format en dévoilant les futurs S1 et S1R + son association avec Leica et Sigma pour une monture d’objectif commune (la monture L). En un peu plus d’un mois, la planète photo a donc accouché de 5 nouveaux APN plein format. Et si j’ajoute Fuji qui annonce un nouveau moyen format, le GFX 50R, ça fait 6 nouveaux boitiers à arriver sur le marché ces prochains mois.

Ça fait bien longtemps que l’on avait pas vu autant de nouveautés, et de vraies nouveautés. On se croirait revenu dans les années 2003-2004 avec le lancement des réflex numériques grand public.

Le point commun entre tous ces nouveaux appareils ? Ce sont ce que l’on appelle des hybrides ou encore mirrorless (appareils sans miroir).

L’ensemble de ces annonces signent en quelque sorte l’arrêt de mort à moyen terme d’un système photographique vieux de 60 ans : le réflex.

Qu’est ce qu’un hybride ? Quelle(s) différence(s) avec le réflex ?

Pour ceux qui débutent en photographie, il est important de bien comprendre la différence essentielle qui caractérise ces deux types d’appareils. En fait, c’est très simple, ça tient en un seul mot : la visée.

  • Le réflex possède une visée optique. La lumière traverse l’objectif, est réfléchie sur un miroir incliné à 45° puis est guidée jusqu’au viseur grâce à un prisme placé au dessus du miroir. L’utilisateur portant l’oeil au viseur perçoit donc la lumière telle qu’elle rentre dans l’objectif. Lorsque celui-ci appuie sur le déclencheur, le miroir se lève, les rideaux de l’obturateur placé derrière le miroir s’ouvrent, et la lumière vient insoler la surface photosensible (capteur ou film).
  • L’hybride, quand à lui, est dépourvu de miroir et de prisme. La lumière traverse toujours l’objectif (encore heureux !) et arrive directement sur la surface du capteur. L’utilisateur portant l’oeil au viseur perçoit donc une vision électronique qui est celle transmise par le capteur.

Ce passage de relai technologique entre le réflex et l’hybride, ce n’est pas rien. Notez que ça fait 59 ans que la célebrissime monture F qui équipe la totalité des réflex Nikon existe. Chez Canon, la monture EF est plus récente même si elle existe quand même depuis 1987.

Si ces deux fabricants, pour ne citer qu’eux, développent une nouvelle gamme de boitiers et inaugurent de nouvelles montures d’objectifs compatibles à ces boitiers, ce n’est pas juste pour faire joli.

Alors, pourquoi ces changements ? tout simplement parce que l’hybride offre des fonctionnalités que ne peut offrir le réflex. Lesquelles ? J’en ai identifié 10…

1. L’hybride, c’est plus petit et plus léger qu’un réflex

La première différence est donc d’ordre visuelle. A taille de capteur identique, l’hybride est plus petit qu’un réflex.

En effet, vu qu’il n’y a plus de miroir et de prisme dans l’hybride, il est possible de rapprocher l’objectif de la surface du capteur (c’est ce que l’on appelle le tirage mécanique). Au final, l’appareil est moins épais, moins haut et donc par voie de conséquence, plus léger. Cela à également pour effet de permettre de simplifier les formules optiques. Elles sont donc théoriquement plus compactes.

2. L’hybride permet de voir l’image obtenue avant d’appuyer sur le déclencheur

C’est le principal avantage de la visée électronique : voir l’image telle qu’elle sera avant même d’avoir à appuyer sur le déclencheur. Si par exemple votre APN est mal réglé (sous exposition par exemple), et bien la scène apparaissant dans le viseur sera plus foncée de ce qu’elle est en réalité. On peut donc corriger en temps réel les paramètres de prise de vue.

De plus, une fois la photo prise, elle s’affiche dans le viseur, ce qui est bien entendu tout à fait impossible avec une visée optique. Il est du coup possible de reprendre une photo dans la foulée tout en conservant le même cadrage.

3. L’hybride peut afficher tout un tas d’informations dans le viseur lors de la prise de vue

Cette visée numérique permet d’afficher bien plus de choses que la scène que l’on s’apprête à photographier. C’est l’équivalent de la visée à l’écran qui équipe les réflex récents. Si l’utilisateur le souhaite, il peut par exemple afficher l’histogramme, les zones sur ou sous exposées, ou encore les zones de netteté (Focus peaking). C’est un sacré plus pour ceux travaillent en mise au point manuelle ou pour gérer très finement la profondeur de champ.

4. L’hybride permet de filmer en ayant l’oeil collé au viseur

A l’exception des réflex Sony qui sont munis d’un miroir semi transparent, les réflex traditionnels imposent de filmer via l’écran du fait que le miroir est en position relevée lors de la prise de vue (la lumière n’arrive plus au viseur). Filmer au viseur peut être intéressant quand la forte luminosité empêche de bien voir ce qui s’affiche sur l’écran. Et puis, on bouge forcément moins lorsque l’on maintient l’appareil contre son oeil et coudes serrés.

5. L’hybride comporte bien plus de collimateurs AF et permet de régler la mise au point sur la quasi totalité de la surface du capteur

La ou les réflex ne peuvent faire la mise au point que sur la zone centrale de l’image, la conception même des hybrides leur permet d’avoir des collimateurs AF positionnés sur la totalité de la surface du capteur. De plus, ces collimateurs sont bien plus nombreux sur les hybrides. Par exemple, Canon annonce pas moins de 5655 positions AF sur son EOS R là ou le 5D mark IV propose 61 collimateurs. Ce système favorise le suivi des sujets mobiles. Les photographes sportifs ou animaliers apprécieront…

6. L’hybride a un mode rafale bien plus rapide que le réflex

On n’imagine pas, modestes utilisateurs d’APN que nous sommes, de ce que c’est que de concevoir un appareil dont le miroir est capable de se lever et se rabaisser 14 fois par seconde, sachant qu’entre chaque vue, le système à le temps de faire la mise au point et que les rideaux présents dans l’obturateur situé derrière le miroir s’ouvrent et se ferment eux aussi 14 fois par seconde.

Et bien avec l’hybride, on en est aujourd’hui à 30 images/s sur les modèles les plus véloces. Si vous vous intéressez à la photographie sportive au animalière, c’est un point à étudier.

De plus, sachez que certains appareils atteignent ces rafales élevées sans le phénomène du « voile noir » propre à la visée réflex.

7. L’hybride permet d’atteindre des vitesses de prise de vue stratosphériques

Si, comme le réflex, l’hybride possède un obturateur mécanique à rideaux pour maîtriser le temps pendant lequel la lumière arrive sur le capteur, il peut également solliciter ce que l’on appelle un obturateur électronique. Résultat : un temps de pose pouvant aller jusqu’à 1/32 000 de seconde. Photographier à très grande ouverture, face au soleil devient donc aujourd’hui possible.

8. L’hybride à un mode de déclenchement qui peut être totalement silencieux

Un miroir qui monte et descend, ça fait forcément du bruit (le fameux clic-clac). En sollicitant l’obturateur électronique à la place de l’obturateur mécanique, il est aujourd’hui possible de rendre la prise de vue totalement silencieuse. Les amateurs de photo animalières ou d’images prises sur le vif apprécieront cette nouvelle façon de travailler.

9. L’hybride offre un choix beaucoup plus important d’optiques qu’un réflex

Cela peut paraître paradoxal. Bien que plus récent, et avec par conséquent un parc d’optiques dédié plus restreint, vous pourrez sans problèmes mettre vos anciens objectifs de réflex sur un futur hybride. Pourquoi ? tout simplement à cause (ou grâce) au tirage mécanique.

Comme je l’ai précisé plus haut, le tirage mécanique correspond à la distance entre le capteur et la baïonnette de fixation présente à l’arrière de l’objectif. Là ou il est important sur un réflex (du fait de la présence du miroir), il est très court sur un hybride. Du coup, il est parfaitement envisageable de mettre un adaptateur entre l’objectif et l’hybride et de réutiliser à peu de frais, ses bonnes vieilles optiques.

Prenons un exemple : la fameuse monture F de chez Nikon (les réflex donc) nécessite un tirage mécanique de 46,5 mm. Elle est de 16 mm sur la nouvelle monture Z qu’ils viennent d’inaugurer (les hybrides). 46,5-16 = 30,5 mm. Avec un adaptateur d’une épaisseur de 30,5 mm, je peux donc parfaitement mettre mes objectifs en monture F sur un boitier conçu pour y mettre des objectifs en monture Z. CQFD !

Encore plus fort, il est tout à fait possible de trouver des adaptateurs permettant de mettre des optiques d’une marque d’objectif sur une autre marque d’hybride. Les fabricants de baïonnettes d’adaptation doivent se frotter les mains !!

10. L’hybride permet de mettre des optiques très lumineuses qui n’existent pas sur un réflex

Enfin, le passage à un faible tirage mécanique associé à une large monture d’objectif abouti à un large cône émergent. Au final, cela permet de simplifier les formules optiques et ça ouvre les portes à la création d’optiques ultra lumineuses. Je pense notamment au 58 mm f0,95 et au 28-70 f2 annoncés respectivement par Nikon et Canon.

Les inconvénients de l’hybride

Bien sur, l’hybride n’a pas que des avantages, il a aussi son lot d’inconvénients…

  • En premier lieu, le système de visée. En effet, si j’ai présenté les avantages de la visée électronique tout à l’heure, elle a aussi ses points faibles. Il ne faut pas perdre de vue que celle-ci reste, malgré les progrès technologiques accomplis ces dernières années, moins agréable que sur un réflex. Cette visée peut ne pas convenir à tous le monde. De plus, en regardant dans le viseur et en faisant des mouvements de translation avec l’appareil, il peut y avoir un temps de latence (ça ne va pas aussi vite que la vitesse de la lumière). Pour les photos prises sur le vif, cela peut donc être un problème.
  • Ce sont aussi des appareils très énergivores. On fait bien évidemment beaucoup moins de photos avec une charge de batterie pleine sur un hybride que sur un réflex. La faute à qui selon vous ? Au viseur qui a bien entendu besoin d’énergie pour fonctionner.
  • Dernier inconvénient important : le capteur se salit rapidement. Si vous changez souvent d’optiques sur votre boitier, vous avez intérêt à apprendre à nettoyer votre capteur. Je discutais récemment avec un utilisateur d’hybride Sony et celui-ci me disait qu’il lui faut penser à éteindre son appareil à chaque changement d’optique. Ceci, pour éviter au capteur de rester chargé en électricité statique et donc d’attirer la poussière environnante. Ça peut être un gros inconvénient pour ceux qui travaillent dans l’action. C’est pour cette raison que Canon a mis en place un système qui permet de fermer automatiquement les rideaux de l’obturateur dès lors que l’on retire l’objectif du boitier.

Faut-il continuer d’acheter des appareils photo de type réflex ?

Je ne peux évidemment pas passer à la conclusion de cet article sans avoir répondu à cette question.

La réponse est très simple : bien sur que oui !

Alors, vaut-il mieux, en cette fin d’année 2018, acheter un hybride ou un réflex ? Et bien, comme à chaque fois, il faut se poser les bonnes questions… Quel genre de photo vous voulez faire ? Dans quel environnement ? Quelles sont les fonctions les plus importantes pour vous ?

Vous faîtes beaucoup de randonnées en montagne et aimez prendre des photos des paysages que vous traversez ? L’hybride, de par sa légèreté et son faible encombrement, est sans doute à privilégier.

Vous faîtes de la photo sportive en grande quantité ? Il est probable que la perspective d’avoir à changer souvent de batterie avec l’hybride soit un handicap de taille et que vous optiez pour un appareil de type réflex.

Ce n’est pas parce que l’on ne parle que d’hybride en ce moment que le réflex est mort et enterré (contrairement à ce que je dis dans le titre de cet article 😉 ). C’est un système abouti, hyper fiable, qui est le fruit de 60 ans de progrès techniques et d’améliorations continues.

Ne perdez pas de vue que la gamme optique conçue pour les réflex est très étendue et largement plus importante que celle des hybrides. En 59 années d’existence de la monture F, Nikon a vendu un peu plus de 100 millions d’optiques. Croyez-moi, ils ne sont pas prêts à laisser tomber leurs clients. La preuve, de nouvelles optiques en monture réflex sont annoncées pour cette fin d’année. Et puis, le jour ou vous passerez en hybride, il vous suffira de prendre l’adaptateur qui va avec…

Ces deux types d’appareils vont cohabiter pendant encore plusieurs années mais il est clair qu’à plus ou moins long terme, le réflex va disparaître du parc de matériel. Il faut quand même en être conscient.

Conclusion

Pendant longtemps, les hybrides ont été des appareils techniquement inférieurs aux réflex. La faible définition du viseur et son taux de rafraîchissement trop lent ne pouvaient rivaliser avec le confort que procure la visée optique. De plus, c’étaient des appareils lents. Leur système autofocus poussif (à détection de contraste) rendait la photo de sport et d’action hors de portée de ce type d’appareils.

Mais ça, c’était avant… Aujourd’hui, les progrès technologiques ont fortement atténué, voir supprimé ces différences, et l’hybride est à même de concurrencer le réflex dans bien des domaines.

Pour beaucoup de personnes, l’encombrement et le poids des réflex sont un frein à l’achat de ce type de matériel. C’est cela qui a été à l’origine de la création des hybrides par Panasonic en 2009. C’est encore plus le cas aujourd’hui ou les gens se sont habitués à utiliser leurs téléphones et dont la qualité des images qu’ils produisent ne cesse de s’améliorer. Le développement de la gamme des appareils sans miroir est donc la réponse des industriels pour séduire de nouveaux clients et inciter au renouvellement du parc de matériel.

Le combat sur le marché de l’hybride risque d’être sanglant. Sony, Nikon, Canon, Fuji, Panasonic, Olympus, Leica et Sigma. Ça fait pas moins de 8 fabricants. Il est probable que Pentax va également réagir à court ou moyen terme. C’est le dernier grand fabricant d’APN à ne pas avoir à ce jour de gamme en hybride. Au final, on sera donc à 9 acteurs à se partager le marché. Certains sont déjà très bien installés (Sony, Fuji, Panasonic et Olympus) et d’autres veulent leur part du gâteau, notamment sur le marché du plein format (Nikon, Canon et Panasonic). Aujourd’hui, on arrive à une offre hybride qui est réellement conséquente et supérieure à toutes les autres familles de produits (réflex, compacts et bridges).

Au final, le gagnant ce sera vous, les consommateurs car il est certain que les prix vont baisser. Avec autant de fabricants, ça ne fait pas de doutes…

Est ce que les trois grands formats de capteurs vont persister dans le futur (micro 4/3, APS-C et plein format) ? Honnêtement c’est encore trop tôt pour le dire.

Et vous, envisagez-vous d’acheter à court terme un appareil photo numérique de type hybride ?

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